À Kinshasa, les vidéos de contrôles routiers contestés inondent les réseaux sociaux. Elles montrent des pratiques allant de l’intimidation à la destruction de plaques d’immatriculation, suscitant l’indignation et une défiance croissante envers les forces de l’ordre. Face à ces dérives présumées, il devient urgent de rappeler le cadre légal et l’impératif de transparence.
Le paysage urbain de Kinshasa a trouvé un nouveau théâtre de tensions : les barrages routiers. Alors que les contrôles de police sont une routine, leur déroulement est de plus en plus souvent filmé par des citoyens, transformant leur smartphone en outil de témoignage et de contestation. Ces séquences, partagées massivement sur les plateformes sociales, jettent une lumière crue sur des méthodes qui, dans certains cas, semblent franchir la ligne rouge.
Des scènes choquantes qui deviennent virales
On y voit des scènes récurrentes : un fonctionnaire en uniforme ouvrant la portière d’un véhicule et s’installant à la place du passager sans autorisation, des échanges tendus où la pression pour obtenir de l’argent semble palpable, ou encore l’acte le plus spectaculaire et destructeur, l’arrachage pur et simple d’une plaque d’immatriculation. Ces images, bien que souvent tronquées et hors de leur contexte complet, frappent les esprits.
Elles alimentent un récit collectif d’abus de pouvoir et cristallisent un sentiment d’impuissance face à des pratiques perçues comme arbitraires.
Le rappel nécessaire du cadre de la loi
Face à cette polémique, il est essentiel de revenir aux textes qui régissent les prérogatives des forces de l’ordre. La loi est pourtant claire :
· Accès au véhicule : Un agent n’a pas le droit de pénétrer à l’intérieur d’un véhicule sans le consentement du conducteur ou sans un motif légitime et proportionné, tel qu’une suspicion de crime ou de délit flagrant. S’installer dans une voiture pour faire pression sur son occupant constitue un abus.
· Plaques d’immatriculation : Le retrait ou la confiscation des plaques est une mesure strictement encadrée. Elle ne peut intervenir que dans des circonstances précises : suite à une décision de justice, en cas d’irrégularité manifeste de la plaque (fausse, illisible) ou si le véhicule est déclaré en état de vol. Arracher une plaque est un acte purement destructeur et illégal, qui n’est prévu par aucun texte. Cela relève du vandalisme et peut être poursuivi comme tel.
Comme le souligne Arnold Maketa, juriste spécialisé en droit routier :
« La procédure est là pour protéger à la fois l’agent et le citoyen. Tout écart, comme l’endommagement délibéré d’une plaque, constitue non seulement un abus d’autorité mais aussi une faute disciplinaire et pénale pour l’agent. Le citoyen est en droit de refuser une telle action. »
Un fossé de méfiance qui s’élargit
Au-delà de l’illégalité de certains actes, c’est l’impact sur la relation police-population qui est le plus préoccupant. La viralité de quelques cas problématiques, amplifiée par les réseaux sociaux, suffit à entacher l’image de l’ensemble de l’institution. Elle jette une ombre sur le travail de la majorité des fonctionnaires qui exercent leur métier avec intégrité et dans le respect des règles.
Cette défiance, si elle s’installe, est nuisible pour tous. Elle complique le travail de la police et nourrit un sentiment d’insécurité juridique chez les citoyens, qui ne savent plus à quels droits ils peuvent légitimement prétendre lors d’un simple contrôle.
Pour une relation apaisée : connaissance des droits et transparence
Sortir de cette spirale nécessite une double action. D’une part, il est crucial que chaque citoyen connaisse ses droits et ses devoirs pour pouvoir les faire valoir calmement et avec fermeté. Savoir qu’un agent n’a pas le droit d’arracher sa plaque ou de fouiller sa voiture sans raison valable est un premier pas vers un contrôle plus équilibré.
D’autre part, il est impératif que la lumière soit systématiquement faite sur ces accusations. Les hauts commandements de la police et de la gendarmerie doivent enquêter sur les vidéos qui font polémique, identifier les responsables d’éventuels abus et sanctionner les comportements illégaux. Cette transparence est la seule voie pour restaurer la confiance et préserver la légitimité des forces de l’ordre, garantes de l’ordre public et du respect de la loi qu’elles sont censées incarner.
Dans l’ère du numérique, où chaque action peut être filmée et diffusée en quelques secondes, la plus grande protection pour un agent comme pour un citoyen reste le strict respect de la procédure.
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