Dans la nuit du 13 au 14 juin 2025, Kinshasa a vécu un paradoxe climatique historique : 90 mm de pluie en 6 heures (un record jamais observé même en saison pluvieuse) –mse sont abattus sur la capitale en pleine période censée être la plus aride de l’année . Un événement qualifié par la METTELSAT (Agence nationale de météorologie et télédétection par satellite) de « saison sèche femelle », une anomalie s’opposant radicalement à la sécheresse intense typique de la saison sèche « mâle » .
D’après l’ingénieur Augustin Tagisabo, chef du centre météorologique national, ce bouleversement résulte d’une inversion des flux atmosphériques :
« Normalement, c’est l’anticyclone de Sainte-Hélène [vent du sud-ouest] qui domine, mais son activité est ralentie par des vents du nord-ouest en provenance du golfe de Guinée. À Kinshasa, on devrait avoir la sécheresse, mais il pleut. Au nord du pays, c’est l’inverse : ils connaissent la sécheresse alors qu’ils devraient avoir des pluies » . Ce déséquilibre, amplifié par le réchauffement des eaux océaniques (30°C en surface), illustre l’impact croissant des dérèglements climatiques sur les régimes saisonniers .
Kinshasa paralysée : le bilan des dégâts
Les images de la capitale congolaise au matin du 14 juin sont inquiétantes : avenues transformées en rivières, voitures immobilisées, quartiers entiers sous les eaux. Les communes de Matete, Limete, Kintambo et Ngaliema, Mont-ngafula ont payé le plus lourd tribut. Le quartier tel que Dilandos (Limete) et les avenues principales comme le boulevard du 30 Juin ou l’avenue du Tourisme (« Nzela Mayi ») sont devenus impraticables, paralysant toute circulation .
Cependant, L’avenue Libération à Makala est défigurée par des crevasses et des nids-de-poule géants, tandis que des têtes d’érosion endommagent les artères de Mont Ngafula .
À Ngaliema, un mur s’est écroulé sur une maison, détruisant l’habitation. un miracle a évité des pertes humaines . La Lukunga (entre Ngaliema et Mont-Ngafula) et la Maluku (pont Tshamala) ont débordé, inondant les maisons riveraines de Kintambo .
Si la « saison sèche femelle » est une anomalie météorologique, ses impacts sont amplifiés par des vulnérabilités structurelles bien connues à Kinshasa :
- Constructions anarchiques : Des milliers d’habitations bordent les rivières Kalamu, Makelele ou Lukunga, obstruant les lits naturels et aggravant les inondations.
- Réseaux de drainage défaillants : À Salongo (Limete), des habitants dénoncent l’insuffisance des travaux de curage face aux crues de la rivière Ndjili, aggravées par les pluies en amont au Kongo Central .
- Contraste agricole national : Alors que les maraîchères de la vallée de la Ndjili (4 977 exploitantes) voient leurs cultures noyées, le Nord-Kivu et le Sud-Kivu subissent une sécheresse précoce, menaçant la sécurité alimentaire du pays .
« Pourquoi juin ? » : l’inquiétude des Kinois
« On n’a jamais connu ça ! Les pluies diluviennes ne se poursuivent pas habituellement en juin », s’alarme Angélique Kahozi, religieuse de 65 ans . Son sentiment est partagé par des milliers d’habitants surpris par ces précipitations hors saison, d’autant qu’elles font suite aux pluies meurtrières d’avril 2025 (70 morts, 21 606 ménages sinistrés) .
Pourtant, la METTELSAT avait anticipé ces perturbations : dès mars 2025, elle alertait sur des précipitations « excédentaires » à Kinshasa entre mars et mai, liées à des masses nuageuses convectives et à la température anormale des océans . Mais l’absence de système d’alerte opérationnel laisse la population sans défense.
Saison sèche « femelle » vs « mâle » : le duel climatique
Que signifient ces termes scientifiques ? La METTELSAT les utilise pour distinguer deux visages de la saison sèche : CaractéristiqueSaison sèche « femelle »Saison sèche « mâle »Précipitations Pluies fréquentes et intenses (ex: 90 mm/jour) Sécheresse absolue Période typique Juin 2025 (anormale) Juin à septembre (normale) Cause primaire Vents du nord-ouest + réchauffement océanique Alizés du sud-ouest stables Impact agricole Inondations détruisant cultures maraîchères Stress hydrique réduisant les rendements Risques sanitaires Paludisme, choléra (eaux stagnantes) Affections respiratoires (poussière).
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