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Sonorités Africaines en Temps de Guerre : Quand la musique devient refuge et arme de conscience (Tribune de Niamba Malafi)

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La guerre dans la partie l’Est de la République Démocratique du Congo n’est pas seulement une affaire de géopolitique et d’intérêts économiques. Elle est aussi une question de conscience collective, de culture et d’identité. Tandis que les armes crépitent, que les civils fuient et que les discours politiques oscillent, une question demeure : que devons-nous écouter en cette période sombre ?

La musique, bien plus qu’un simple divertissement, est une boussole dans le chaos. Elle peut être une source de résistance, une mémoire vivante du drame en cours, un cri de ralliement ou encore une manière de transcender la douleur.

Ce que nous écoutons façonne notre conscience

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À Kinshasa, dans le Kivu ou au grand Katanga, l’ambiance musicale des bars, des marchés et des médias semble parfois déconnectée du drame qui se joue. Les sonorités festives, souvent axées sur la danse et le divertissement, dominent nos playlists, tandis que les nouvelles de massacres, de déplacements forcés et d’occupations illégitimes se multiplient.

Si nous écoutons uniquement de la musique qui nous fait oublier, comment pouvons-nous nous rappeler que nous avons une responsabilité dans ce qui arrive à notre peuple ? Le droit de se divertir est légitime, mais il ne doit pas nous endormir. La musique doit aussi nous éveiller, nous mobiliser et nous rappeler que nous sommes acteurs de notre destinée.

Quelles musiques écouter en temps de guerre ?

  1. La musique de la mémoire et du témoignage

Des artistes ont chanté la douleur du peuple et raconté les histoires des victimes. « Masanga » de Bella Bella & Frères Soki et « Congo Avenir » de Tabu Ley restent des références historiques. Aujourd’hui, où sont les chants qui narrent nos tragédies contemporaines ? Où sont les voix qui pleurent les enfants massacrés à Goma comme dans  »Bayibi Nga Bomwana » de Jean Goubald, les femmes violées à l’Est comme dans  »L’Homme qui répare les femmes » de Médine en feat Noraa & Keblack et les déplacés oubliés comme dans  »Cas na Nga » de Lexxus Légal en feat Oliverman et Sista Becky ?

  1. La musique de la révolte et de la mobilisation

À travers le monde, la musique a servi de carburant aux révolutions. Miriam Makeba et Hugh Masekela ont chanté contre l’apartheid. Fela Kuti a dénoncé les dictatures en Afrique de l’Ouest. Où sont nos équivalents en RDC ? Des artistes comme Declat Idengo ou Yekima de Bel’Art tentent d’éveiller les consciences, mais le terrain est miné par la censure et le manque d’intérêt du public. Nous devons écouter et soutenir ceux qui osent chanter la vérité.

  1. La musique spirituelle et introspective

Parfois, il ne s’agit pas seulement de se révolter, mais aussi de trouver la force de survivre. Les negro spirituals aux États-Unis, les chants soufis dans le monde arabe, ou encore la musique gospel et les cantiques congolais offrent une forme de résistance intérieure.
Les peuples en guerre ont toujours eu besoin de chants qui apaisent et réconfortent. Où sont nos kasala qui nomment nos millions de morts ?

  1. La musique qui relie à nos racines

La rumba congolaise, lorsqu’elle n’est pas seulement un prétexte pour danser, est un puissant vecteur d’histoire. Mais nous devons aussi redécouvrir nos musiques traditionnelles, celles qui portent la mémoire des anciens, des guerres du passé, des victoires et des souffrances de nos peuples.

La responsabilité du public : que faisons-nous de nos oreilles ?

Un peuple qui danse pendant que son territoire est envahi n’est pas seulement insouciant : il est en danger de mort culturelle et politique. Écouter une musique qui ne fait que divertir dans un contexte de guerre, c’est aussi une manière de détourner le regard, de refuser d’assumer son rôle dans l’Histoire.

Nous devons demander plus à nos artistes. Nous devons leur exiger des chansons qui racontent la guerre, qui dénoncent les injustices et qui portent un message de changement. Nous devons aussi, en tant que public, faire l’effort d’écouter ce qui nous élève, ce qui nous rappelle que nous avons un pays à défendre et une mémoire à préserver.

Si nous voulons un Congo en paix, commençons par changer ce que nous écoutons.

✍️Par Niamba Malafi
Initiateur du Salon des Bruits des villes africaines, Auteur et observateur des dynamiques culturelles en Afrique centrale.
Artiste pluridisciplinaire et entrepreneur culturel


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